Lexicon / affect attunement

Douglas Edric Stanley

1997.10.16

Terme introduit par Daniel Stern pour décrire un deuxième degré de relations produit dans les interactions nourrisson-mère. L’accordage affectif prend des éléments discrets d’interactions et les introduit dans un mouvement d’accordage presque musical par lequel les actions des deux sujets s’orientent autour d’une action commune pour faire sentir une émotion ou une intention autre que l’événement discret exprimé. L’accordage affectif correspond à une perception amodale dans laquelle une image peut se réfléchir en son ou en toucher à cause d’un substrat perceptif qui ne distingue pas encore les modes de perception (ouïe, vue, toucher,etc.). Les exemples donnés par Stern décrivent tous ce passage inter-modal par lequel l’événement d’un mode perceptif est réfléchit par l’événement d’un autre mode :

« Un garçon de neuf mois tape avec sa main sur un jouet mou, au début avec colère puis progressivement avec plaisir, exubérance et gaieté. Il le fait avec un rythme régulier. La mère prend ce rythme pour dire “kaaaa-bam, kaaaa-bam”, bam correspondant au coup et le “kaaaa” au balancement préparatoire du bras retenu en l’air avant qu’il ne tombe… Une fillette de dix mois joue de façon amusante et répétitive avec sa mère et la regarde. Le visage de la petite fille s’ouvre (sa bouche s’ouvre, ses yeux s’élargissent, ses sourcils se soulèvent) et puis se referme, dans une série de transformations dont le contour peut être représenté par un arc assez plat [(]. La mère répond en psalmodiant “Ouuh” avec une hauteur de son qui s’élève puis descend comme le volume qui va crescendo puis decrescendo : “Ouuh !”. Le contour de la prosodie maternelle s’est accordé au contour dynamique du visage de l’enfant » Daniel Stern, The Interpersonnal World of the Infant, p.183-184

L’importance de l’accordage, c’est qu’il produit une variation dans l’événement qui a lieu entre les deux sujets. Selon Stern, l’accordage affectif, puisqu’il est amodal, ne consiste pas seulement à « imiter » quelqu’un d’autre pour lui faire sentir qu’il est en accord avec nous. L’accordage introduit un décalage dans la réflexion, ainsi qu’une schématisation ou une diagrammatisation du geste réfléchi. L’accordage peut avoir lieu selon diverses modalités : l’intensité (niveau d’intensité des comportements), la pulsation temporelle (des gestes produits ou réfléchis), le rythme, la durée, la forme (reproductions de types de mouvements, etc.) [p.145; p.190].

cf.affects de vitalité, fréquence, hyperbole, réflexion, relation

bibliographie :

projet personnel :

La morsure

La morsure, chorégraphie interactive, installation et CD-Rom, Douglas Edric Stanley et Andrea Davidson à partir de son oeuvre Le bûcher où brûle une. Au lieu de réfléchir les gestes de l’interacteur dans l’image, ses mouvements sont également réfléchis dans le son. Un mouvement intense ou rapide de la souris, par exemple, déclenche un son de respiration rapide, à bout de souffle. Un mouvement lent comme une caresse, produit le même son, mais ralenti, comme s’il était étiré dans le temps. Ici, comme dans l’accordage affectif, les mouvements de l’interacteur sont réfléchis dans la scène mais dans une autre modalité que celle par laquelle ils sont saisis. Le « caractère » d’un geste, son effort, est traduit en son, en image, même en programmation puisque c’est l’intensité générale de l’interacteur qui détermine le caractère du déroulement du récit.