Argument. Ce diagramme décalcage (ou « carbon_copy » en anglais) illustre le procédé de décalcage, tel qu’on peut le voir dans de machines comme Carbon, Unreal Art, ou remap. On le trouve également dans la toute première version du célèbre logiciel Photoshop (cf. tableau) 1.0 de Thomas Knoll :
Dans Photoshop cela s’appelle le « tampon ». En cliquant à un endroit d’une image, puis une deuxième fois à un autre endroit dans l’image, on établit un rapport entre le premier point et le deuxième. Ce qui permet, par la suite, de transférer les propriétés du premier point — c’est-à-dire sa couleur — au deuxième point.
Dans le diagramme ci-contre, ce traitement est automatique, on ne fait pas le travail pixel par pixel comme dans Photoshop : en haut, deux types d’images, un tableau de valeurs colormétriques ordonnées selon une figure, et le même tableau de valeurs colormétriques distribués de façon désordonné. En cliquant sur les deux images on peut passer d’un type de tableau à l’autre.
En bas du diagramme il y a un espace vide dans lequel sera transféré les valeurs colormétriques des images du haut. Un index relie les deux espaces et determine le context du transfert. Il y a deux modes de mouvement de cet index : zigzag et linéaire. En cliquant sur un des deux boutons d’ailleurs, on peut passer d’une mode à l’autre.
Le mode zigzag, comme son nom l’indique, fait balader de façon aléatoire l’index du référent/copy. A partir de l’endroit où se trouve l’index, celui-ci choisit un nouveau emplacement dans une des huit positions autour de lui et s’y déplace. Une fois déplacé, il récupère la couleur dans le pixel de l’image de référence et copie sa couleur dans le pixel corréspondant de l’image copie.
Comme le diagramme fait son travail point par point, on peut voir le procédé de décalcage à l’œuvre. Mais en laissant l’index se balader assez longtemps, on finit par voir l’ensemble du tableau de Duchamp.
Si l’index erre en dehors de l’espace du tableau, l’index se boucle sur la face opposée, suivant la logique de l’effet pacman. De cette façon, l’index reste toujours à l’intérieur de l’espace du tableau, quelque soit la direction qu’il décide de prendre.
Le mode linéaire fait balader l’index ligne par ligne, de gauche à droite, et de haut en bas, dans le sens de lecture occidental. Dans ce mode nous voyons au ralenti la méthode de transfert traditionnel de l’ordinateur, c’est-à-dire comme une longue ligne que l’ordinateur transfert d’un registre à l’autre de façon linéaire.
Le décalcage est une des conséquences de la spatialisation discrète, c’est-à-dire du fait que |’ordonnement des données comme des données acéphales. N’importe quel point peut être dupliqué, dédoublé comme un fantôme, à n’importe quel endroit. Mais du même trait, il révèle également la façon dont ce déplacement non-linéaire peut dévoiler des représentations parfaitement linéaires (cf. GOTO) et ouvrir la machine à la figuration. Le décalquage garde les logiques analogiques — c’est-à-dire les figures et relations locales — de ce qu’il décalque. Mais c’est une figure à découvrir, à être déssiné dans un processus itératif — au moins au niveau de la machine (et ralenti ici pour être visible). L’endoit de départ et l’arc de son déplacement, autrement dit les vecteurs ou l’attaque du décalcage, dénature la figure homogène de départ (cf. le « Gestalt » chez Rosalind Krauss) et transforme la figure en des hyperfigures modulaires. L’introduction du temps et de ses lenteurs (cf. plot) dans le transfert permet la modulation de la figure finale. Il devient même difficile de parler de finalité, car celle-ci, même arrêtée, s’est construit finalement dans un processus en émergence.
cf. effet pacman, Carbon, Unreal Art, remap